Bless? par l?ironie, tu? par le silence, Justin a disparu dans l'indiff?rence g?n?rale.
Sans laisser de traces.
Pourtant, son visage ne s?est pas effac?, sa voix ne s?est pas ?teinte.
Car celui qui sait voir, per?oit, celui qui sait ?couter, entend.
Restait ? dire, ? ?crire? contre l?oubli.
Ainsi Justin retrouve-t-il peu ? peu son histoire et le chemin du monde au fil d?une parole qui se m?le ? la sienne, inextricablement.
Une voix en ?cho qui noue, maillon apr?s maillon, les ?v?nements de sa br?ve existence dans un r?cit violent, pudique et g?n?reux qui le rend ? son nom, aux autres et ? l?histoire.

Se trouver, soi, en donnant vie ? l'autre : tel est le th?me fondamental de ce roman dont l'acuit? du regard social et de l'analyse psychologique est servi par un style tour ? tour violent, pudique et tendre.

EXTRAIT DE LA POSTFACE

Un fait divers banal. Une horreur parmi tant d?autres. Pourquoi cet ?v?nement a-t-il pris en moi un tel relief ? Pourquoi s?est-il ainsi impos? dans ma vie, cherchant une place? qu?il a trouv?e, s?y installant, me tourmentant jusqu?? ce que je prenne le temps de m?asseoir pour l??couter vraiment ? ?couter cette voix qui peu ? peu retrouvait son corps, sa vie, son ?me.
Deux ann?es durant, la voix de Justin m?est ainsi parvenue, s?est confi?e ? moi. Une voix t?tue d?enfant qui, lorsque j?h?sitais ? copier ses propos, insistait :
" Justement ! Je le sais, je l?ai vu ! "
Deux ann?es d?intimit? complice au cours desquelles j?ai ri de l?entendre rire, pleur? de ses larmes, de l?immense d?tresse contenue ensuite dans sa voix d?homme.
Mais quel r?le ?tais-je cens?e jouer dans tout cela : celui du m?dium ? Quelle harmonie me demandait-on d?apporter dans ce drame du pass? qui n??tait pas le mien ?
? l??poque, ma d?tresse personnelle, ma vuln?rabilit? extr?me m?ont-elles pouss?e ? percevoir ces mots qui ne m?appartenaient pas ? Peut-?tre.
Peut-?tre me suis-je identifi?e ? cette souffrance. Peut-?tre ai-je confondu la voix qui insultait ma propre vie avec celle qui l?humiliait, lui. Peut-?tre ai-je associ? la main qui me frappait ? celle qui le mettait nu ? Peut-?tre...
L?ai-je vraiment entendue, cette voix, o? n?a-t-elle ?t? qu?un caprice de mon imagination, tout comme la voix de mon p?re, juste apr?s mon coma ?
Pourtant, lorsque Justin s?est tu, je suis rest?e d?sempar?e devant ma feuille blanche, ? demander, humblement, tr?s humblement :
" Justin, t?es o? ? T?es parti o? ? "
Et c?est une voix grave, une voix d?homme, qui a murmur? en moi : " L?, tout au fond de ton c?ur. J?y ai retrouv? mes billes et mes bonbons de toutes les couleurs ". Juste avant que le voix d?enfant t?tue ne revienne chantonner :
" Et m?me que j?y resterai ! Justement que j?y resterai ! "
Puis le silence s?est fait. Ici. Ailleurs. D?finitivement.
J?ai serr? le manuscrit contre moi. Une larme de joie l?a mouill?, qui n??tait pas la mienne, je le sais.

Nine La?gt raconte:

Le jour ou j'ai d?cid? de proposer mon manuscrit ? un ?diteur, j'ai tout simplement consult? l'annuaire de la Poste. C'?tait la veille d'un jour f?ri?. Apr?s deux ou trois coups de fil infructueux - soit l'on me demandait de rappeler, soit l'on me proposait d'envoyer mon texte, bien que le sujet ne semblait pas correspondre aux collections d?velopp?es - je suis tomb? sur l'intitul? Les 3 Orangers qui m'a interpell?e. J'ai donc appel?. Une voix masculine m'a r?pondu, m'a ?cout?e et m'a aid?e ? m'exprimer (j'?tais angoiss?e). Je me suis sentie en confiance et sus d'embl?e que mon livre serait aim

Un fait divers dans toute l'horreur de sa banalit

Une d?marche sensible et intelligente de se trouver, soi, en donnant vie ? l'autre au fil d'un roman dont l'acuit? du regard social et de l'analyse psychologique est servi par un style tr?s vivant.

Nine LAÜGT